Mieux manger pour pas plus cher

L’un des principaux obstacles à une bonne alimentation, entend-on souvent, est le coût des aliments sains. Les fruits et les légumes sont horriblement chers, quant à la viande, n’en parlons pas. Pourtant, en jetant un œil sur les caddies des gens, que ce soit au supermarché ou dans les magasins bio, ou encore en scannant le frigo et les placards des copains, on peut arriver à une quasi-certitude : quelles que soient vos dépenses d’alimentation, vous pouvez manger mieux, et peut-être meilleur, sans dépenser un centime de plus, même et surtout si vous avez des enfants.

1. La question énergétique

Le premier problème en matière de nutrition, c’est de mettre dans son assiette suffisamment d’énergie pour tenir debout jusqu’au soir. Trouver la quantité d’énergie nécessaire à survivre pose rarement problème dans nos contrées, mais c’est souvent au prix de choix nutritionnels dramatiques.

Il y a quelques années, je suis tombé sur une collecte de la banque alimentaire dans le supermarché du coin. La collecte consiste à demander à des gens pas très riches de choisir eux-mêmes dans les rayons ce qu’ils souhaitent donner. On leur demande bien sûr de choisir des produits capables de se conserver longtemps, des produits de base. C’est très instructif parce que dans ces conditions, les donateurs cherchent à donner ce qu’ils pensent être le meilleur (parce qu’ils sont en général généreux), pour une dépense la plus faible possible (parce que c’est eux qui paient). On peut donc supposer qu’ils choisissent ce qu’ils pensent être le meilleur choix en terme de rapport qualité/prix dans une optique de restriction budgétaire.

J’imagine que tout le monde l’a deviné, les collecteurs se retrouvaient submergés sous des stocks de spaghettis. Vraiment un excellent rapport énergie/prix, et tout le monde ou presque avait logiquement fait ce choix, dans l’idée que les destinataires de l’aide avaient surtout besoin d’énergie.

Comme je n’aime pas faire comme tout le monde, je m’étais pointé ce jour-là avec quelques kilos de légumes secs : des lentilles, des pois chiches, des haricots secs, des pois cassés. Ca avait beaucoup étonné les collecteurs, et il avait fallu que je vante les mérites des légumineuses devant leur moue dubitative. Mais après explication, ils avaient quand même bien dû admettre que le rapport éléments nutritifs totaux/prix était très largement en faveur des pois chiches.

Si vraiment vous êtes dans une situation difficile, ou si vous connaissez autour de vous des gens dans de telles situations, plutôt que de vous gaver de pâtes, de pain et de patates, pensez aux légumineuses. Un plat de lentilles avec quelques légumes fait un repas bien meilleur nutritionnellement, et bien plus nourrissant, qu’un plat de pâtes, pour un coût sans doute inférieur.

2. Les protéines

Une fois qu’on a résolu le problème de l’énergie, le second problème est celui des protéines, même s’il n’est pas nécessaire de faire une fixation à ce sujet. Mais là encore, la qualité nutritionnelle globale des aliments contenant des protéines peut être très variable.

L’aliment le plus complet et le plus adapté à son consommateur, dans toutes les espèces de mammifères, c’est le lait maternel. Inutile de rappeler à tous les parents que rien ne le remplace, même s’il est aujourd’hui terriblement carencé en oméga 3. Et il revient infiniment moins cher que tous les substituts possibles.

Pour les adultes, la meilleure source de protéines, la plus équilibrée en acides aminés essentiels, c’est l’œuf. Et ça tombe bien, les œufs, ça ne coûte pas trop cher. De 3 à 10 euros le kilo selon leur qualité. Et même si les œufs bon marché sont là encore horriblement carencés en oméga 3, et obtenus dans des conditions scandaleuses, il n’en reste pas moins qu’ils sont la source de protéines la plus accessible à un petit budget, et qu’ils peuvent facilement être présentés à des enfants, notamment.

Pour rester dans les protéines animales et résoudre le problème des oméga 3, une solution simple et peu onéreuse consiste en la consommation de poissons gras. Le hareng fumé est un bon exemple, mais on peut trouver des sardines fraîches chez son poissonnier pour le même prix, c’est-à-dire deux à trois fois moins cher que de la viande rouge. L’avantage des poissons entiers est qu’ils sont aussi une excellente source de calcium.

Et il reste toujours la solution végétarienne, à condition de penser à compléter les céréales par des légumineuses, du sésame, des noix et amandes, et des graines variées. Tous ces aliments se trouvent à des prix comparables ou inférieurs à ceux des protéines animales précitées. Quoi qu’il en soit, même si on se réserve la possibilité de consommer poissons gras et œufs, augmenter et varier les sources de protéines végétales est le plus souvent une bonne chose, et leur coût reste très modéré (sauf pour les noix et amandes issues de l’agriculture biologique).

3. Les micronutriments

A partir du moment où l’on améliore considérablement la qualité de l’alimentation de base, il devient assez facile de se rapprocher d’une alimentation vraiment équilibrée : cette alimentation de base est déjà en elle-même assez riche en micronutriments, il ne manque pas grand-chose pour la rendre acceptable (alors que si la base est assise sur le triptyque pain-pâtes-patates, il est quasiment impossible de trouver l’équilibre).

Pour parvenir à cet équilibre sans augmenter son budget, l’immense majorité de la population n’a plus qu’à faire le petit effort de réduire sa consommation d’aliments préparés : prétendre que manger bien revient trop cher quand on consomme allègrement quantités de plats cuisinés et d’aliments transformés est une absurdité. Un aliment transformé industriellement revient deux à trois fois plus cher qu’un aliment brut à qualités nutritionnelles égales.

Les plats cuisinés, même les moins chers, reviennent plus cher que n’importe quelle salade un peu enrichie préparée à la maison, et sont une catastrophe nutritionnelle.

Un goûter à base de biscuits industriels et de produits laitiers sera toujours plus coûteux qu’une pomme et quelques amandes, et ses qualités nutritionnelles seront bien plus faibles. Si vous avez des craintes concernant le développement osseux de vos enfants, sachez que des amandes et des fruits contiennent à peu près autant de calcium assimilable que la quantité équivalente de produits laitiers, et n’acidifiera pas leur organisme.

Une expérience à faire lors qu’une soirée est de remplacer les sempiternelles chips, machins apéritifs et trucs gras et mous par des légumes. Le chou blanc cru remplace très bien les chips, revient bien moins cher, et disparaît, curieusement, aussi vite.

En règle générale, on arrive très bien à remplacer n’importe quel produit transformé par quelque chose de naturel, bien meilleur nutritionnellement et gustativement, sans aucun surcoût.

Tout un tas d’aliments se consomment par ailleurs très bien crus, ce qui réduit considérablement le coût énergétique de la préparation, les besoins en matériel, le temps de préparation, et la difficulté de la vaisselle qui suit.

Les graines germées peuvent aussi être une solution extraordinairement économe. Un kilo de lentilles (soit moins d’1euro en magasin discount) donne 3 ou 4 kilos de graines germées. Bien moins cher qu’une laitue, et bien plus nourrissant. Et il n’est même pas certain qu’il soit plus contraignant de produire des graines germées que de laver une salade. Et il est sans doute bien plus éducatif auprès des enfants de voir germer des graines dans un bocal que d’acheter une salade dans un sachet plastique.

A priori, il doit être possible à n’importe qui, quel que soit son budget, de composer des menus acceptables nutritionnellement à partir de ces quelques conseils. Le fait de rétablir une base alimentaire correcte serait notamment très utile dans le cadre d’une alimentation collective, que ce soit dans le cadre de restaurants d’entreprises ou d’établissements d’enseignement, ou dans celui d’associations caritatives. Alors la prochaine fois que vous aurez l’occasion de donner pour la banque alimentaire, ou qu’on vous demandera votre avis sur les menus de la cantine de vos enfants, ou tout simplement que vous serez dans une passe un peu difficile sur le plan financier, rappelez-vous ces quelques conseils. Et même si vous n’avez aucun problème financier, que vous faites toutes vos courses dans des magasins bios, vous pouvez sans doute manger beaucoup mieux pour votre budget actuel.

15 commentaires sur « Mieux manger pour pas plus cher »

  1. bonjour pourriez-vous me donner votre recette pour le pain car j’ai la maladie de verneuil
    je vous remercie d’avance
    amicalement

  2. Votre texte, si intéressant , date de 2010 !! Me lirez-vous quand même: je suis également une adepte du régime Seignalet.. Je le pratique depuis très longtemps. Le matin pour le petit déjeuner hé me fais des galettes de sarrasin mais comme j.aimerai que vous m’offriiez votre recette de pain ! Un grand merci. Bien à vous. Nicole

  3. Bonsoir, si je peux me permettre un peu de pub, qui va dans le sens des commentaires précédents, je conseillerai à Mirzein de lire le fabuleux livre du Dr Seignalet sa «  »maladie » » y est très bien décrite. Mangez sauinement en enlevant le plus possible les aliments « blancs » (lait, farine-pates-pain et riz raffinés)
    Bon courage

  4. bonjour a tous,
    je vous remercie de vos commentaires qui me conforte dans un reel sentiment de mal-bouffe qui occasionne un mal etre general et parfois des maladies….. je mange le plus possible d aliments bios de legumes de pates, de riz et de pain complets…..tres peu de viande depuis environ deux ans hor cette annee j ai developpe une polyarthrite rhumatoide assez agressive pour laquelle je dois commencer un traitement de chimiotherapie ( NOVATREX ) j aimerai savoir si le retrait de certains aliments et l ajout d autres pourrait m etre benefique et si oui lesquels ???

    en tout cas je vous remercie beaucoup pour vos conseils

  5. Bonjour.

    J’ai enlevé blé et lait et leurs dérivés, et fait tout comme ce qui est indiqué dans l’article et ceci depuis 1 an et 4 mois en m’inspirant de Seignalet. J’ai 61 ans, sportif et problèmes de dos. Bilan : plus le même homme, énergie retrouvée, perte de 8 kgs (de 71 à 63) et disparition de beaucoup de douleurs articulaires, surtout le dos. Ma base de nourriture : graines (mélange quinoa-sésame par exemple) et légumineuses. Plus de nourriture « blanchie » : riz et farines blancs et bien sûr plus de farine de blé et dérivés, sauf un peu de petit épeautre. De la viande et du poisson mais pas plus que ça (presque plus le soir), des crudités (gros mangeur de salades), un peu de vin rouge (bio), du thé (bio), du chocolat (bio et noir), huiles olive et colza bio, sel et sucre complets et maintenant graines germées en plus. Je fais mon pain sans blé (recette personnelle : riz, sarrasin, soja la base mais d’autres farines) : rien à voir avec le pain au blé classique et plus facile et plus rapide à faire et meilleur. J’ai toujours à portée de main des mélanges de graines vendues en biocoop : mélange 1 énergétique : noix, noisettes, noix du brésil, noix de cajou, caneberge, raisins secs et mélange 2 : tournesol, courge.

    Plus cher qu’avant ? Je ne pense pas mais surtout, le plus étonnant, la sensation d’être rassasié et plus la même digestion et plus d’endormissement après repas. Bref, plus le même ! Après plus d’un an, vérification par mon docteur avec forces analyses biologiques. Résultat ? Le meilleur bilan jamais eu, pas de carences (en particulier calcium) et baisse de 28% du mauvais cholestérol. Tout dans les normes. Etonnant mais, pour moi, pas surpris d’après mes sensations.

  6. Pour répondre au commentaire de Nicole : une bonne partie des achats de malbouffe provient de la structure socio-professionnelle dégradée. Les gens n’ont « plus le temps » de préparer à manger, et « pas l’argent » d’acheter leurs plats préparés chez le traiteur. On tombe donc dans les pâtes et les patates et les produits transformés suremballés, surmarketés, et surmauvais.

    Mais à y réfléchir : pourquoi on n’a plus de temps pour préparer à manger ? Parce qu’on est au travail. Pourquoi on est au travail ? Pour gagner plus de sous pour acheter les produits préparés chers et mauvais qu’on est obligé d’acheter parce qu’on n’a pas de temps pour préparer à manger. Il est assez facile faire le calcul que les travailleurs les moins rémunérés (c’est à dire une majorité croissante) auraient tout intérêt à diminuer leur temps de travail et dépenser moins pour manger mieux.

    C’est en tout cas mon pari à l’arpent nourricier.

  7. samedi passé c’était le jour de la collecte de la banque alimentaire.
    En suivant vos conseils, j’ai laissé dans leur caddie quelques kilos de lentilles vertes !
    merci pour tout

  8. bonjour!

    tout à fait véridique!
    J’ai moi même changé mon alimentation il y a 6 mois pour privilégier les fruits et légumes de toutes sortes (frais, secs, légumineux, oléagineux) et non seulement j’ai perdu les kilos que j’avais acumulés ces 3 dernières années mais aussi je me suis rendu compte que je ne dépense pas plus en courses, bien au contraire (une fois qu’on élimine tous les produits transformés industriels que ce soit les biscuits ou les plats préparés pour privilégier les produits de base complets)!
    Comme quoi une alimentation saine et équilibrée peut aussi être économique, il suffit d’être inventive et de changer ses (mauvaises) habitudes.

    Merci pour cet article qui résume tous mes efforts récompensés de ses 6 derniers mois qui sont maintenant devenus pour moi des automatismes

  9. peut on manger des oeufs regulièrement? j’ai entendu queqluepart, qu’il ne faut pas en manger plus d’une fois par semaine, est-ce vrai ?

  10. « je ne sais pas si c’est très bio mais je fonctionne beaucoup avec le congélateur. »
    nan, c’est pas terrible, mais bon, comme ton congélateur tourne de toute façon, autant le remplir. Il dépensera moins d’énergie à l’ouverture…

    Le coups des spaghettis, c’est systématique, perso je comprends pas : c’est un produit transformé.
    C’est forcément plus cher que les équivalents non transformés.

    Donc bon, vive le blé, le riz, les haricots secs, les lentilles, les pois…

    pas les pois-chiches ; c’est pas bon pour l’effet de serre.

  11. la surgélation comporte un « blanchiement » c’est-à-dire un passage rapide dans l’eau bouillante et de ce fait une partie des micro-nutriments et des facteurs secondaires sont détruits !

  12. Vrai.
    C’est un problème d’organisation quand on a une famille nombreuse et qu’on travaille en plus(de la maison) en extérieur.
    je ne sais pas si c’est très bio mais je fonctionne beaucoup avec le congélateur.
    A préparer un plat je triple les doses et je congèle deux parts pour les jours de flemme.
    A faire une quiche j’en fais deux (une qui cuit avant le repas, l’autre pendant et qui se retrouve congelée).
    les pâtes (pizza, quiche, tartes)toujours avec un minimum d’un kilo de farine, je les fais quand je suis bien reposée, et la pâte qui reste est étalée et congelée (bien pratique)ou en vrac conditionnée pour un seul plat.
    comme nous mangeons dans la cuisine le plus souvent, le repas suivant, un peu élaboré, cuit pendant le repas précédent(soupes,légumes secs…ou autres, nous ne sommes pas végétariens, mais nous mangeons peu de viande).
    J’emploie aussi le système des repas »à tiroirs », à faire du riz, je fais tout le paquet(dans l’eau):
    j’en congèle pour les farcis de la semaine suivante.
    repas un: riz à….
    repas deux:farcis
    repas trois: ce qui reste en salade de riz ou broyé dans la soupe de légumes.
    nicole
    Ps pour les jours de fatigue des boites de légumes secs c’est moins fatigant que des pâtes, je confirme…

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.