L’été sera chaud. L’hiver, faut voir.

Avec les températures qu’on a en ce moment, on a tendance à oublier que l’hiver ça existe encore. Et que, réchauffement climatique ou pas, on pourrait encore bien connaître quelques surprises capables de déstabiliser EDF, par exemple. C’est pas parce que notre société a une mémoire de poisson rouge qu’il faut oublier que le climat a une certaine tendance à suivre des cycles, pas toujours faciles à comprendre et à prévoir.

La dernière vague de froid digne de ce nom à avoir touché la France date de l’hiver 1996-1997. Le froid s’était installé vers noël sur l’est du pays, et avait persisté jusque vers le 10 janvier. On n’avait pas vraiment flirté avec les records de froid, mais on avait eu un petit aperçu de ce que peut encore être l’hiver.

Il faut remonter encore 10 ans en arrière, entre 1985 et 1987, pour trouver les derniers hivers vraiment froids. Débutée brutalement en janvier 1985, une série de vagues de froid avait déferlé sur la France.

Hormis l’épisode d’il y a 10 ans, entre 1987 et aujourd’hui, rien de bien notable. Bien sûr, il arrive qu’il neige, et même copieusement, ici ou là. Ce qui se remarque d’autant plus que notre monde a de plus en plus besoin de chaussées impeccables et voies de communication toujours dégagées. Il arrive qu’il fasse assez froid pendant quelques jours. Mais rien qui puisse se comparer aux grands hivers d’antan, 1956 ou 1962-63. Le réchauffement climatique étant de plus en plus probable, on en vient facilement à penser qu’il ne fera plus jamais réellement froid, et qu’il n’y a plus de saison, ma p’tite dame.

Pourtant, il m’arrive parfois de mener quelques raisonnements, sans doute parfaitement antiscientifiques, qui font froid dans le dos quand on y pense.

Par exemple, le dernier hiver extrêmement froid que nous ayons connu remonte à 1879-1880. Cet hiver-là, les températures ont approché les -30° en Ile de France, causant quelques dommages à la végétation et sans doute aux classes défavorisées.

Mais bon, on est d’accord, depuis cette date, le climat s’est réchauffé, ça ne peut plus arriver. Pour être précis, le climat s’est réchauffé d’environ 1° jusqu’à maintenant. Ouf, on est rassuré. La situation qui a apporté la vague de froid en question, si elle se reproduisait, ne causerait dans nos campagnes que des températures approchant les -29°. Rien de grave.

Et si on considère que l’hiver dernier a été exceptionnel par sa durée (depuis 114 ans, il n’y avait jamais eu aussi peu de jours où la température a dépassé 10° à Paris entre la mi-novembre et la mi-mars, même en 1962-63), on peut se dire que les hivers actuels peuvent encore approcher les hivers du 19ème siècle.

Qu’il y ait eu 20 années sans hiver très froid n’est pas particulièrement significatif non plus. Par exemple, entre décembre 1890 et janvier 1929, soit une période de 38 ans, il n’y a aucun hiver comparable, au choix, à 1985, 86 ou 87. Ce qui veut dire qu’on a déjà connu, il y a un siècle environ, bien avant le réchauffement climatique, une période de plusieurs décennies sans vague de froid majeure. Ce qui n’a pas empêché des hivers très froids de se produire ensuite. On retrouve un peu la même chose entre février 1963 (la fin d’un terrible hiver) et janvier 1985 : 22 ans sans vrai hiver à se mettre sous la dent.

22 ans, d’ailleurs, c’est peut-être le chiffre à retenir. C’est celui qui correspond à peu près à deux cycles solaires. Le soleil a en effet des variations d’activité cycliques : tous les 11 ans environ, il passe par un maximum. Puis, 5 ou 6 ans plus tard, par un minimum. Or, si cette activité n’a pas d’effet direct sur le climat, on constate des coïncidences troublantes : le dernier minimum solaire a eu lieu en…97. Le précédent a duré de 1985 à 1987. On relève une autre période de faible activité de 1963 à 1966. Et encore une avant cela vers 1954, l’hiver qui a rendu fameux l’Abbé Pierre, et qui a été suivi par le terrible mois de février 56. L’hiver 1879-80 correspond à un minimum solaire, ainsi que 1890-91. Avec une certaine tendance à sauter un cycle solaire : les années 40 plus froides que les années 50, moins froides que les années 60, plus froides que les années 70, etc.. Soit 22 ans.

Bien sûr, certains hivers semblent échapper à la règle : 1928 est en plein maximum solaire, et, on l’a vu, il y a un exemple au moins de deux minima solaires successifs sans le moindre hiver froid ces 150 dernières années.

Toujours est-il que nous arrivons cet hiver dans un nouveau minimum solaire, qui durera probablement deux ou trois ans, 22 ans après 1985, et qu’il se pourrait qu’on ait l’occasion de constater que le réchauffement climatique ne nous assure pas encore des hivers méditerranéens. Mais bon, en météo, il ne faut jurer de rien au-delà de quelques jours. Tout ce qu’on sait, c’est que l’été indien se termine brutalement au milieu de la semaine qui vient, et ça, c’est une certitude, maintenant.

9 commentaires sur « L’été sera chaud. L’hiver, faut voir. »

  1.  » de faire les semis après les risques de forte gelées (en dessous de -7 dans le cas des fèves) »
    C’est à dire en fait faire des semis de printemps?
    pas avant mars…
    étant donné que chez moi il y a forcément des jours où on atteint -12°C, voire moins, je n’ai pas de moyens de faire de semis d’automne de fève, de pas grand chose en fait…

  2. L’hiver ne promet rien. Sinon, ce serait facile de faire de la météo. Je n’ai pas de connaissances en prévisions à long terme. Plutôt des connaissances de climatologie et une passion pour le froid, la neige et les statistiques depuis tout petit, qui m’ont incité à faire pas mal de recherches sur les hivers froids. Je ne peux donc parler qu’en termes de probabilités. La probabilité d’avoir un hiver froid est plus grande que la normale. Elle le sera encore plus si novembre est plus doux que la moyenne (c’est un autre critère amusant : octobre + novembre doux = plus de risque d’hiver froid).

  3. « c’est un peu tard en effet »
    Si l’hiver promet d’être très rude ce serait plutôt un peu tôt, auquel cas il serait meilleur de faire les semis après les risques de forte gelées (en dessous de -7 dans le cas des fèves).

  4. c’est un peu tard en effet.
    j’en ai semé 4 , des fèves, il y a trois semaines, pour essayer en culture d’hiver (chez moi c’est rude) et la buute super surelevé que je venais de faire; il y a aussi des repousses spontannées ou des auto-semi de fèves(c’est l’ébauche d’un jardin auto-fertile…où il n’y aura qu’à récolter et laisser faire). j’ai mis aussi des épinards.
    ça germé, mais c’est petit.
    je crois qu’un agricoolteur m’a dit (concernant les couverts végtaux, mais ça doit être pareil pour le reste) que ce sont les plantes développée qui sont sensible au gel, par les petites. à confirmer.

    Je me demande si ça pousse dans les jours d’hiver où il gèle pas, ces petites plantes (maintenant un minimum de production de biomasse en hiver). Si j’aurai des épinards. On verra.

  5. Les cycles solaires ne sont qu’une première approche de l’explication du retour plus ou moins régulier d’hivers froids. Pas mal d’autres paramètres entrent en jeu. Un certain nombre de météorologistes, amateurs ou professionnels, s’essaient à la prévision saisonnière, avec plus ou moins de bonheur. On en a un exemple ici, pour ceux qui voudraient s’amuser à vérifier la qualité des prévisions : http://www.meteo-paris.com/france/previsions-saisonnieres.html

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